Interview de M. Fabien HENRIET (FH), vice-président & Mme Adélaïde CARTIER (AC), directrice générale des services, CC Entre Doubs et Loue (25)
Quelles sont les missions qu’exerce le service ?
Fabien HENRIET (FH) : Les missions du service sont de collecter et traiter les eaux usées. Nous jouons aussi un rôle de conseil auprès des usagers.
Adélaïde CARTIER (AC) : Nous avons pris la compétence Assainissement de façon globale en 2020 (nous exercions déjà la partie traitement depuis 2000). Nous travaillions à ce titre avec un prestataire de service pour nos stations d’épuration. Lorsque nous avons récupéré l’héritage des réseaux, la question s’est posée du suivi, ce qui a justifié le développement de la CC et la création d’un service Assainissement à part entière. Nous avons 4 stations d’épuration qui sont relativement récentes : la 1ère située à Ouhans a été faite en 2000, et la dernière qui est à Arc-sous-Cicon est achevée depuis cette année. C’est donc un parc de traitement récent et en bon état de fonctionnement. S’agissant du réseau, il nous reste toutefois un gros travail à faire, ne serait-ce qu’en termes de connaissance.
Quels sont les enjeux de la gestion de l’assainissement sur votre territoire ?
FH : Les enjeux principaux sont de développer le service, de continuer à travailler à l’amélioration de nos stations, et de travailler sur les réseaux (nous avons, comme tout le monde, des eaux parasites). Nous devons aussi effectuer un travail de sensibilisation des usagers sur l’assainissement, qui est encore mal connu. Jusqu’à présent, l’assainissement passait dans un second plan et la tarification n’était pas à la hauteur du service rendu. Aujourd’hui, nous avons fortement augmenté les tarifs, et on voit que cela crée de l’échange et des interrogations. Les gens ne se rendent pas compte de tout ce qu’il y a derrière ces tarifs.
AC : Nous sommes aussi l’illustration de l’assainissement en milieu rural. Notre plus petite commune compte 70 habitants et la plus grosse 1 800 habitants. Nous sommes donc face à des enjeux de linéaires de réseaux très importants. C’est une gestion totalement différente de celle d’un territoire semi-urbain par exemple. Nous avons également une grosse problématique qui est le devenir des produits résiduels, incluant les boues d’épuration. En milieu rural auparavant cela ne posait pas de problème, puisque l’épandage était la pratique habituelle. Maintenant qu’il n’est plus vraiment d’actualité, ce sont devenus de très forts enjeux, avec des sommes colossales et pas mal d’incertitudes. La question est aussi : comment optimiser notre exploitation, maintenant que le gros de l’investissement est fait ? Et comment continuer de l’améliorer ? Nous avons des zones sensibles, comme ce réseau en bordure de la vallée du Doubs, proche de la nappe phréatique sujette aux remontées d’eau. Aujourd’hui nous sommes à une échelle qui nous permet d’avoir cette vision globale, depuis l’évacuation de l’habitant jusqu’au rejet de la station d’épuration dans le milieu naturel.
La ou les plus grandes réussites du service sur les dernières années ?
FH : Le Schéma directeur, et la sensibilisation des élus, lors de la prise de compétence en 2020. L’assainissement n’est pas un sujet facile à appréhender, y compris pour les élus. Ainsi que la réalisation de 2 grosses stations d’épuration en 3 ans, pour 5 M d’€ d’investissement, et la mise en place du service grâce auquel nous pouvons maintenant anticiper, nous projeter sur les points d’amélioration et non plus uniquement subir le quotidien.
AC : Nous sommes fiers aussi de la nouvelle station d’épuration de Ville-du-Pont qui est à proximité de la zone d’Entre-Roches où l’on a les grosses pertes du Doubs. Confrontés aux assecs du Doubs, nos rejets se devaient d’être très bons. Nous avons dépensé 3M d’€, pour pouvoir faire face à 50 % de pollution agro-alimentaire qui arrive dans cette station. De même, nous avons réhabilité le poste de refoulement d’Arçon, qui générait de la pollution depuis une bonne 20aine d’années, au début des pertes du Doubs. C’est un chantier qui n’était pas facile entre le Doubs, la route départementale et au sein d’une agglomération. Arc-sous-Cicon est une station plus petite, 2 000 EH, c’était à peu près 1,5 M d’€ d’investissement. C’est une station représentative de l’assainissement en milieu rural, avec une zone de pré-traitement végétalisée. Elle est aussi en zone très sensible, près de la source de la Loue, et en milieu karstique.
Nous concevons l’assainissement comme un tout incluant le grand cycle de l’eau, et non uniquement comme une question d’évacuation.
La gestion administrative de la prise de compétence, et la bonne appropriation de chacun, plus qu’une réussite, est un point sur lequel nous sommes très attentifs. Ce n’était pas gagné au départ, nous sentions la prise de compétence, comme un dessaisissement des communes qui ne voulaient plus entendre parler de leurs problèmes d’assainissement. L’intercommunalité nous la pensons aujourd’hui comme une complémentarité, parce que nous n’avons ni la structure ni l’échelle pour tout chapoter. Seule une collaboration de terrain nous permet de fonctionner correctement. A titre d’exemple, nous n’avons pas pris la compétence Eaux pluviales, il est donc nécessaire d’avoir une vraie collaboration entre communes et CC pour régler le problème des eaux parasites.
Quels sont les projets en cours ou à venir ?
FH : Hormis ceux que l’on a déjà évoqué, détecter les endroits où des économies de fonctionnement sont possibles, et travailler sur les pollutions. Nous nous sommes fixé des règles strictes, avec des interventions dès qu’il y a une pollution. Nous essayons d’ouvrir toutes ces pistes, et de travailler comme l’a dit Adélaïde entre le pluvial et l’assainissement. Fixer un cap, un budget et aller de l’avant, en fonction de nos moyens (nous avons harmonisé en une fois le tarif entre toutes les communes et quasiment doublé en l’espace de 4-5 ans). Par ailleurs, la commission de l’Assainissement travaille sur un schéma directeur de l’eau potable, puisque nous anticipons une potentielle prise de compétence (s’il n’y pas de contrordre d’ici là). Nous travaillons aussi sur le volet performance, étudions la possibilité de télégestion, etc.
AC : Nous avons également un vaste programme de travaux pour passer de l’unitaire au séparatif, avec un horizon d’une 15aine d’années environ pour arriver à un réseau en bonne et due forme.
L’ASCOMADE pour vous c’est quoi ?
FH : Adélaïde du fait de son rôle connait mieux l’ASCOMADE que moi.
AC : Je connaissais l’ASCOMADE depuis longtemps parce que j’utilisais beaucoup votre Foire aux questions, quand je n’avais pas encore de Technicienne assainissement. Et l’action engagée fin 2023 pour la problématique de la gestion des boues d’épuration à l’échelle du département, nous a incité à adhérer, aussi pour ne pas profiter de ces services sans y contribuer. Je pense que plus le temps avance, plus nous, collectivités, aurons besoin de ce type de service. Les enjeux de la gestion de l’eau et de l’assainissement dans le futur, avec les incertitudes liées au changement climatique, font que nous pourrons difficilement nous passer de l’assistance et du conseil que vous offrez.