L’interview de Thierry LITZLER (vice-président en charge de l’Eau).
Comment s’est déroulée la prise des compétences Eau et Assainissement par SLA* en 2020 ?
Thierry LITZLER : Le transfert des compétences a été fait au 1er janvier 2020. Monsieur WIEDERKEHR et moi étions élus à SLA, mais pas encore en charge de l’Assainissement et de l’Eau à cette date. La pandémie, arrivée quelques jours après les élections, avait repoussé à juillet 2020 l’installation du nouveau conseil. Nous n’avons donc pas menée la période de préparation et de transfert.
Ce sont essentiellement les services qui ont préparé ce transfert depuis 2018, ainsi que mon prédécesseur à partir de fin 2019. Un état des lieux a été réalisé : état du patrimoine bâti et des réseaux. Le volet humain a été aussi important, notamment pour la partie régie car les services de SLA n’étaient pas dimensionnés pour pouvoir récupérer ces compétences. Il a donc fallu transférer également les moyens humains, des communes et syndicats vers SLA, en veillant à ce que ces changements s’effectuent dans les meilleures conditions pour les agents.
Station d’épuration de Village Neuf*
Quels ont été les points de réussite et difficultés éventuelles rencontrées ?
T.L. : Les points de réussites étaient : d’avoir eu un consensus des 40 collectivités, ainsi que tout le travail réalisé en amont pour la mutualisation. La difficulté principale a résidé dans la réorganisation du personnel : il fallait répartir au mieux celui-ci sur les 3 sites (au siège et les deux pôles de proximité) pour le bon fonctionnement du service, tout en s’assurant que chaque agent puisse exercer des missions pour lesquelles il ou elle avait des appétences, et en harmonisant les statuts et conditions de travail de chacun.e. Après 2 ans de travail sur cette réorganisation, nous pouvons dire que le défi a été relevé.
Quels sont les enjeux concernant la gestion de l’eau sur votre territoire ?
T.L. : L’enjeu principal aujourd’hui est la sécurisation de l’approvisionnement en eau, tant en quantité qu’en qualité. Nous avons un territoire très dynamique, avec le taux de progression démographique le plus important du Grand Est (plus de 2 % par an), grâce notamment à la proximité de la ville de Bâle et son bassin d’emploi. Il faut que le territoire continue de rester attractif économiquement. Les services publics doivent donc suivre, et en ce qui nous concerne, l’Eau et l’Assainissement.
Nous devons donc faire face à : l’accroissement de la population, mais aussi la diminution de la pluviométrie et la fréquence des chaleurs et des sécheresses entrainant la baisse du niveau de la nappe. Par ailleurs, un de nos puits devra s’arrêter prochainement (situé à l’intérieur de l’emprise de l’aéroport de Bâle-Mulhouse). Nous l’exploitions à titre de dérogation, et celle-ci prendra fin en 2024. Ainsi, nous avons lancé une étude pour trouver de nouveaux puits.
Le dernier enjeu, lié aux précédents, est financier : pour pouvoir assurer le bon fonctionnement des services d’Eau et d’Assainissement, il faut prévoir le budget nécessaire à la réparation et au remplacement de tout élément électromécanique qui viendrait à dysfonctionner. Ce budget peut représenter 6 à 700 000 € par an d’investissements, en Eau comme en Assainissement.
Chambre de vannes – Eau potable*
Quels sont les projets à court, moyen et long terme ?
T.L. : Pour le volet qualité de l’eau, nous travaillons sur son amélioration dans des secteurs ciblés sur 4 puits. 19 de nos puits font également partie du projet ERMES*. Nous mettons aussi en place des PSE (Prestations pour Services Environnementaux) à destination des agriculteurs qui sont prêts à appliquer des bonnes pratiques, sur des aires de captages. L’objectif qui est aussi un défi, est de conventionner avec 40 agriculteurs, ce qui représente un budget d’1,2 M€, avec en principe une aide de l’Agence de l’eau. Ces PSE s’inscrivent dans ce qu’on appelle des « contrats de solutions » : une démarche globale dans laquelle nous sommes engagés pour la protection de nos aires de captage. Ils entreront en vigueur à partir de janvier 2023.
Par ailleurs, nous organisons l’interconnexion de nos réseaux. Nous avons fait une grande interconnexion l’année dernière, du nord au sud de l’agglomération.
Nous avons aussi démarré des travaux cette année, en vue d’améliorer la qualité de l’eau de la commune de Neuwiller, qui a eu du Chrome 6 et du Chloridazone. L’idée est de faire une connexion depuis la commune d’Hégenheim jusqu’à Neuwiller. Ce maillage, par le mélange des eaux, permettra d’obtenir de nouveau une eau de qualité. Cela représente un investissement de 2 M€ que nous finançons par l’emprunt. C’est à la fois une mission de santé publique, et de solidarité intercommunale vis-à-vis de la commune de Neuwiller qui n’aurait pas eu les moyens de financer seule une telle opération.
Le dernier élément pour 2023 est le géo référencement de l’ensemble de nos réseaux (une partie du territoire est déjà référencée). Cette connaissance du réseau permettra d’intervenir plus rapidement en cas de fuite.
Avec ce même objectif, nous allons sectoriser les grandes communes, à l’aide d’appareils appelés Loggers, posés tous les kilomètres, pour repérer les fuites très rapidement. Pour rappel, les fuites représentent de l’eau non facturée à l’usager, mais que l’on produit et distribue, en utilisant de l’énergie et des moyens humains. Elles font donc baisser le taux de rendement du service.
Bassin d’orage – Hésingue*
L’ASCOMADE pour vous c’est quoi ?
T.L. : Ça a été une découverte quand j’ai pris la compétence Eau potable. Aujourd’hui, pour moi l’ASCOMADE est un réseau d’élus qui partagent leurs expériences. C’est aussi une association avec des professionnels spécialisés. C’est une source d’information, un moyen d’avoir une veille juridique et technique, ce qui est essentiel, au vu de la complexité des textes et de leurs évolutions. Monsieur WIEDERKEHR et moi-même apprécions également les échanges entre collègues, au-delà de notre territoire, du département et même de la région.
*SLA : Saint-Louis Agglomération
ERMES : Evolution de la Ressource et Monitoring des Eaux Souterraines
Crédits : photographies de Saint-Louis Agglomération, tous droits réservés.