L’interview de Alain COURANT (Vice-président en charge du Transfert des compétences Eau & Assainissement) et Thibaud GOLZNÉ (Directeur des services techniques)
Comment s’est déroulé le Transfert des compétences l’année dernière ?
Alain COURANT (AC) : Nous avions décidé de mener la démarche du transfert de façon participative, avec les élus. Nous souhaitions favoriser la communication et pouvoir répondre aux oppositions et inquiétudes. Le transfert a été validé et est globalement positif. Même si nous avons échappé de peu à une minorité de blocage. Certaines collectivités avaient d’ailleurs voté contre, sans forcément avoir la compétence concernée. D’autre part, le territoire étant très rural (4 communes uniquement ont plus de 500 hab. dont Baume-les-Dames), certaines petites communes craignaient d’être lésées, face au poids que pouvait représenter Baume-les-Dames. Il est nécessaire de continuer à communiquer pour répondre à cette crainte, et de rester vigilants sur ce sujet. Aujourd’hui les élus communaux font appel aux services de la CC ou à moi-même de façon spontanée, et les échanges sont plutôt sereins.
Thibaud GOLZNÉ (TG) : En effet, les 2 années d’étude se sont déroulées de manière très fluide. Certaines questions ne sont arrivées qu’après le transfert, avec la prise de connaissance pour certain·e·s de l’état de leurs installations et des investissements nécessaires.
Comment s’est passé de façon pratique ce volet participatif ?
AC : Il y avait plusieurs niveaux : des rencontres individuelles, pour des raisons techniques ou stratégiques et des commissions de réflexions. Une 30aine d’élus en moyenne participaient à chaque commission. Sur certains sujets, nous avions mis en place des groupes de travail, sur des questions pointues ou sensibles. Les éléments étaient ensuite validés en commission. Il y avait aussi des réunions de secteur qui regroupaient une 15aine de maires. Il y a eu une bonne participation sur toutes ces instances. C’était pour nous un gage de réussite du transfert, et l’expérience nous montre qu’on a eu raison.
TG : Je me suis mis aussi à la disposition des communes, dès qu’il y avait un sujet un peu technique sur lequel ils avaient besoin d’aide. Cela fait partie du rôle de la CC. J’ai notamment participé aux schémas directeurs qui ont été engagés, au niveau des cahiers des charges, dossiers de subvention, etc. Cela participe à la bonne compréhension du territoire.
Et au niveau de l’équipe ?
AC : Dès le début, nous avons embauché un chargé de mission dédié, Thibault, qui est devenu directeur technique. Une fois le transfert effectué, 2 agents de Baume-les-Dames sont devenus les agents techniques sur la CC. Et un chef de service a été embauché il y a 1 mois. Nous avons également signé des conventions de mise à disposition pour les salariés qui étaient à temps partiel dans les communes, sur l’entretien des réseaux ou des STEP. L’équipe des permanents et les agents communaux se concertent pour les opérations d’entretien et pour définir les éventuels travaux à réaliser.
Quels étaient les enjeux concernés par la prise de ces compétences sur votre territoire ?
AC : L’intérêt majeur est la prise en compte des enjeux environnementaux, et la possibilité de traiter en urgence les risques de pollutions. Quelques stations sont dans des seuils limite en termes de pollution (2 mises en demeure notamment), c’était donc important voir urgent que le transfert ait lieu. Aujourd’hui nous avançons par étapes, en fonction des priorités de chaque situation.
TG : Au-delà des mises en demeure, en assainissement de nombreuses stations et/ou réseaux n’étaient pas conformes à la réglementation. L’enjeu est donc la remise en état des installations, pour le bon traitement des eaux usées.
Comment s’articule le duo élu/directeur technique et quelle est son importance par rapport aux enjeux cités ci-dessus ?
AC : Ce duo est évidemment important. Dans notre cas tout se passe bien humainement. Le travail et la communication avec les élus en est facilité. Thibault prend en charge le volet technique, et nous échangeons sur les enjeux avant d’apporter des réponses, ce qui limite les oppositions.
TG : J’ajouterais un 3ème acteur qui est le bureau d’études. C’est une entité indépendante de la CC, qui peut faire des propositions depuis un regard extérieur et objectif. Il apporte une expertise importante au niveau juridique, financier et technique. Chaque acteur a sa pertinence : sans portage politique le transfert serait bien-sûr voué à l’échec, et avoir un chargé de mission dédié à l’étude du transfert est également nécessaire. J’ai passé beaucoup de temps à rencontrer tous les maires, pour établir aussi une relation humaine.
Que pensez-vous qu’apporte cette mutualisation des compétences ?
AC : Un 1er intérêt pour les communes est la réalisation des schémas directeurs (certaines n’en avaient pas, d’autres avaient des schémas supérieurs à 10 ans). 50 % des communes se sont lancées, et en fin d’année nous ouvrirons un appel d’offres pour les communes restantes. La mutualisation permet donc une prise de conscience globale sur l’état de l’AC sur le territoire. Les bénéfices sont aussi financiers, même si ce n’est pas toujours la conviction des maires. Si chaque commune avait à réaliser de son côté les travaux pour répondre aux normes environnementales, ce serait beaucoup plus coûteux.
TG : C’est un argument qui est difficile à faire comprendre. Par exemple, dans les communes rurales, il pouvait y avoir du bénévolat de la part de certains élus, donc des coûts parfois inexistants. Mais d’une part ce type de fonctionnement n’est pas tenable sur le long terme, d’autre part le service n’est pas rendu. La mutualisation permet aussi une prise de recul, et des mises en relation au niveau intercommunal. J’ai en tête le cas de 2 communes qui sont proches géographiquement, mais n’avaient jamais eu l’idée de se mettre ensemble pour avoir 1 seul système de traitement. Là encore, cela permet de limiter les coûts et les investissements. Sur l’eau potable, ce sera la bonne échelle pour travailler à la sécurisation de la ressource.
Quel est l’avantage pour vous d’avoir espacé dans le temps les 2 transferts Eau et Assainissement ?
AC : L’avantage, c’est un peu tôt pour le dire, mais c’était un vrai choix d’espacer ces transferts. Si on faisait tout en même temps, on risquait de cumuler les insatisfactions éventuelles. Par ailleurs, l’essentiel des communes étaient en régie au niveau de l’Assainissement, et en DSP pour l’Eau potable. Pour Baume-les-Dames qui est la commune la plus importante, la DSP se terminant fin 2024, il nous a donc paru pertinent d’attendre 2025 pour transférer l’Eau.
De plus, la CC a choisi de rester dans plusieurs syndicats supra-communautaires. A ce jour, nous sommes en concertation avec les communes pour préciser le cadre et la chronologie du transfert de l’Eau. Comment respecter les DSP et préparer la suivante ? Etc. De plus, les élections arrivent en 2026, avec des changements potentiels dans les communes et à la CC. Ma volonté est que les transferts soient réalisés afin de laisser une situation « propre » pour les successeurs en 2026.
Votre conseil aux collectivités ?
AC : Pas un conseil, mais simplement notre expérience : la transparence, la volonté et l’intérêt porté aux enjeux environnementaux, c’est ce qui a fait la raison de notre engagement et de notre réussite. Un bureau d’études, qui reste neutre sur les différents sujets, une vraie conviction d’élu pour lancer cette opération et de la communication avec les maires.
TG : Ne pas sous-estimer le sujet, et bien prendre le temps de l’étudier. Et surtout ne pas attendre 2026 pour prendre de plein fouet le transfert.
AC : Tout à fait, s’il y a un conseil que je pourrais donner, c’est d’éviter la brutalité de 2026 ! Pour celles et ceux qui auront attendu, ce sera extrêmement douloureux, tant pour la CC que pour les communes.
L’ASCOMADE pour vous c’est quoi ?
AC : Quand nous avons pris la décision du transfert, j’ai eu besoin d’échanger avec d’autres élus sur ces sujets. J’ai donc contacté les collectivités alentour, notamment la CC des 2 Vallées Vertes, qui travaillait avec l’ASCOMADE. C’est ainsi que nous sommes entrés dans le Réseau. D’abord en bénéficiant de l’expérience des autres, puis aujourd’hui avec le plaisir de contribuer à notre tour à partager notre expérience avec les collectivités.
TG : Je vois 2 intérêts à l’ASCOMADE : le réseau et le partage d’informations et de connaissances. Je suis en contact aujourd’hui, même épisodiquement avec des collectivités avec lesquelles je peux échanger. Le 2ème point est le volet technique : quand je sollicite l’ASCOMADE pour une question, j’obtiens une réponse précise et documentée. C’est un appui juridique et technique de qualité.